AZOR, MESRIN, ÉGLÉ.
ÉGLÉ.
Qu’est-ce que c’est que cela qui plaît tant ?
MESRIN.
Ah ! le bel objet qui nous écoute !
AZOR.
C’est ma blanche, c’est Églé.
MESRIN, à part.
Églé ! C’est là ce visage fâché ?
AZOR.
Ah ! que je suis heureux !
ÉGLÉ, s’approchant.
C’est donc un nouvel ami qui nous a apparu tout d’un coup ?
AZOR.
Oui, c’est un camarade que j’ai fait, qui s’appelle homme, et qui arrive d’un monde ici près.
MESRIN.
Ah ! qu’on a de plaisir dans celui-ci !
ÉGLÉ.
En avez-vous plus que dans le vôtre ?
MESRIN.
Oh ! je vous assure.
ÉGLÉ.
Eh bien, l’homme, il n’y a qu’à y rester.
AZOR.
C’est ce que nous disions, car il est tout-à-fait bon et joyeux ; je l’aime, non pas comme j’aime ma ravissante Églé que j’adore, au lieu qu’à lui je n’y prends pas seulement garde ; il n’y a que sa compagnie que je cherche pour parler de vous, de votre bouche, de vos yeux, de vos mains, après qui je languissais.
(Il lui baise une main.)
MESRIN, prenant l’autre main.
Je vais donc prendre l’autre.
(Il baise cette main. Églé rit et ne dit mot.)
AZOR
Oh ! doucement ; ce n’est pas ici votre blanche, c’est la mienne ; ces deux mains sont à moi, vous n’y avez rien.
ÉGLÉ.
Ah ! il n’y a pas de mal ; mais, à propos, allez-vous-en, Azor ; vous savez bien que l’absence est nécessaire ; il n’y a pas assez long-temps que la nôtre dure.
AZOR.
Comment ! il y a je ne sais combien d’heures que je ne vous ai vue.
ÉGLÉ.
Vous vous trompez ; il n’y a pas assez long-temps, vous dis-je ; je sais bien compter, et ce que j’ai résolu, je le veux tenir.
AZOR.
Mais vous allez rester seule.
ÉGLÉ.
Eh bien ! je m’en contenterai.
MESRIN.
Ne la chagrinez pas, camarade.
AZOR.
Je crois que vous vous fâchez contre moi.
ÉGLÉ.
Pourquoi me contrariez-vous ? Ne vous a-t-on pas dit qu’il n’y a rien de si dangereux que de nous voir ?
AZOR.
Ce n’est peut-être pas la vérité.
ÉGLÉ.
Et moi je me doute que ce n’est pas un mensonge.
(Carise paraît dans l’éloignement et écoute.)
AZOR.
Je pars donc pour vous complaire, mais je serai bientôt de retour ; allons, camarade, qui avez affaire, venez avec moi pour m’aider à passer le temps.
MESRIN.
Oui, mais…
ÉGLÉ, souriant.
Quoi ?
MESRIN.
C’est qu’il y a long-temps que je me promène.
ÉGLÉ.
Il faut qu’il se repose.
MESRIN.
Et j’aurais empêché que la belle femme ne s’ennuyât.
ÉGLÉ.
Oui, il l’empêcherait.
AZOR.
N’a-t-elle pas dit qu’elle voulait être seule ? Sans cela, je la désennuierais encore mieux que vous. Partons !
ÉGLÉ, à part et avec dépit.
Partons.
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